En visite chez un M-cène La collection de Leen et David
En visite chez un M-cène
La collection de Leen et David
Leen Gysen (49) et David Lainé (49) vivent pour et par l'art, tant du point de vue personnel que professionnel. Ils sont co-fondateurs de l'atelier de restauration et de conservation d'œuvres d'art IPARC, dont Leen assure la direction administrative, tandis que David est actif comme restaurateur de tableaux et dirige le laboratoire de recherche. À la maison aussi, ils s'entourent d'œuvres d'art. « Actuellement, nous devons toujours nous demander si nous avons encore la place d'accrocher une œuvre supplémentaire. Il n'y en a plus énormément et nous ne voulons rien enlever. »
Leen : « Mon mari et moi, nous sommes la preuve vivante de l'efficacité de l'éducation artistique. Tous deux, nous avons visité beaucoup de musées avec nos parents pendant l'enfance. Et cela nous est resté. »
N'avez-vous jamais pensé : « Pff, encore un musée ? »
Leen : « J'ai travaillé comme chargée de communication et de marketing à Bozar. Nous y avons constaté que les enfants et les adolescents sont fortement intéressés par l'art, pour autant qu'on leur propose un encadrement adéquat. Les visites scolaires au musée ne sont pas toujours vues d'un bon œil : elles sont rébarbatives, trop théoriques… Mais s'ils y vont en famille ou entre amis, c'est une tout autre expérience. Le contexte est essentiel. »
« Bien sûr, ça dépend de l'âge, comme nous le voyons chez nos propres adolescentes. Qu'est qui caractérise l'adolescence ? L'opposition aux parents. Ce qui nous passionne est par définition assommant pour nos filles. Mais ça passe. Je crois dur comme fer qu'il est nécessaire et précieux d'orienter les enfants vers l'art. On sème des graines qui donneront une récolte plus tard. »
Vous êtes M-cènes, ce qui veut dire que vous soutenez financièrement le M. Pourquoi avoir pris cette décision ?
Leen : « David et moi, nous nous sommes connus pendant nos études d'histoire de l'art et d'archéologie à Louvain. Le prédécesseur du M, le Musée Vander Kelen-Mertens, était l'unique musée des beaux-arts de la région. Il a été important pour nous pendant nos études et certainement aussi pour la création d'IPARC. Plus tard, nous avons évidemment été très heureux de la transformation du musée en M, un musée municipal aux ambitions internationales. Louvain en avait vraiment besoin, ce que confirme aussi le succès des formules de M-cène et de M-bassadeur. Il y a beaucoup de gens qui portent le M dans leur cœur. »
POINT COMMUN : L'ART DÉCO
Parlons de votre collection. Comment l'avez-vous démarrée ?
Leen : « Nous avons fait nos premiers pas par le biais de “Kunst in huis”, une organisation qui prête des œuvres d'art contre un montant mensuel modeste. Nous avons même acheté une œuvre grâce à son système de location-vente. Je pense toujours que c'est une initiative fantastique. »
« Je signale d'ailleurs que sous le nom de “Kunst aan zet”, les autorités flamandes accordent des prêts sans intérêt pour l'acquisition d'œuvres d'art. En achetant une œuvre dans une galerie agréée, on peut emprunter ainsi jusqu'à 5000 euros. Cette initiative est d'une grande valeur, car elle facilite le passage vers le circuit commercial. C'est tout particulièrement important en ce moment, car pour les artistes émergents la crise du Covid est une catastrophe. »
Avez-vous une préférence pour certains courants ou certaines périodes ?
Leen : « David s'intéresse surtout à l'art ancien ; il est spécialiste de la période allant du XVe siècle au XVIIe siècle. Moi, c'est plutôt l'art contemporain qui m'attire. Mais nous aimons tous deux l'Art déco, en particulier les nus féminins. »
Combien de pièces compte votre collection ?
Leen : ‘« Une trentaine, dont certaines œuvres qui sont des éditions limitées. De nos jours on en trouve souvent dans les boutiques de musées à l'occasion d'une exposition d'artistes contemporains. »
BEURRE DE CACAHUÈTES !
Parlez-nous de vos œuvres contemporaines ?
Leen : « Nous avons entre autres des pièces de Sarah De Vos et de Studio Borgerstein. Dans notre séjour est accrochée une grande toile de Wouter Steel, un artiste louvaniste. C'est une œuvre photoréaliste représentant un homme que deux jolies filles enduisent de beurre de cacahuète. (rires) Elle porte un titre énigmatique : “Eventually he always knew this day would come”. Ça peut sembler bizarre, mais c'est une œuvre très belle, à la forte présence. »
« Mon mari avait été très impressionné lors du vernissage d'une exposition de Wouter. Moi, j’avais visité son atelier avec les enfants. Plus de cent œuvres y étaient présentes, mais je n'en voyais qu'une. C'était purement instinctif. Les enfants se demandaient ce que c'était exactement, mais ça les intéressait aussi. »
« Nous avons un principe pour nos achats d'œuvres d'art : il faut qu'une œuvre soit belle ou intéressante tant pour David que pour moi. Donc David a visité l'atelier à son tour, sans que je lui dise quelle toile me plaisait tellement. Pour lui aussi, ça a été le coup de foudre. À présent, la toile occupe une place de choix dans notre séjour. »
« Nous avons d'ailleurs appris entretemps que Wouter est le fils d'une professeure d'histoire de l'art passionnée chez qui j'ai effectué un stage pendant ma formation d'enseignante et dont David a suivi les cours. C'est étrange, comme tout se rejoint. »
POÉTIQUE
Et qu'avez-vous comme œuvres d'art ancien ?
Leen : « L'œuvre que nous aimons le plus est une petite peinture du XVIIe siècle représentant trois personnages en pied. Quelques lacunes font apparaître le bois du panneau. Autrefois de tels blancs étaient repeints par un autre artiste, mais la pratique de restauration actuelle y a renoncé. David pourrait bien sûr restaurer le tableau, mais nous le laissons en l'état. C'est très poétique à nos yeux, on observe l'usure du temps. »
À quoi faites-vous attention en achetant une œuvre d'art ?
Leen : « Il n'y a pas de critères précis, nous nous laissons guider par ce que nous ressentons. On pourrait croire que nous sommes attentifs aux éléments techniques – mon mari est restaurateur, donc il sait comment les matières et les œuvres peuvent évoluer et se dégrader au fil du temps. Mais cela ne nous préoccupe pas du tout. »
« Nous espérons que nos filles s'attachent aux œuvres qu'elles voient à la maison. Ce serait dommage qu'elles les vendent quand nous ne serons plus là. Mais elles doivent forger leur propre culture visuelle. »
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